Please note that the following document, although believed to be correct at the time of issue, may not represent the current position of the CRA.
Prenez note que ce document, bien qu'exact au moment émis, peut ne pas représenter la position actuelle de l'ARC.
ACQUISITION DE CONTROLE
Richard S. Biscaro, C.A.
Revenu Canada, Accise, Douanes et Impôt
Avant l'adoption des mesures contenues dans le Projet de loi C-64, devenu loi le 17 décembre 1987, la Loi de l'impôtsur le revenu (la «Loi») renfermait un certain nombre de dispositions qui s'appliquaient lorsque survenait un changement de contrôle d'une corporation. Mentionnons, entre autres, les paragraphes 111(4) à (5.4), l'alinéa 88(1.1)e) et les paragraphes 127(9.1) et (9.2) de la Loi. Le concept d'acquisition de contrôle affectait la capacité d'une corporation d'utiliser les pertes accumulées ou subies avant le moment de la prise de contrôle, mais avait alors des effets beaucoup plus limités qu'aujourd'hui. Des mesures fiscales étaient introduites le 15 janvier 1987 dans un communiqué de presse (et furent plus tard intégrées au Projet de loi C-64) dans lequel le ministre des Finances annonçait qu'il entendait déposer un projet de loi visant à limiter les transferts de pertes et autres déductions entre contribuables non liés. On mentionnait, à titre d'exemple d'opérations d'évitement que l'on cherchait à empêcher, l'utilisation d'une corporation à perte à titre d'intermédiaire dans la vente d'un actif avec une plus-value non réalisée afin de pouvoir appliquer les pertes de la corporation contre le profit réalisé lors de la vente du bien, éliminant ainsi les impôts autrement payables sur le profit. Dans un autre exemple, on mentionnait qu'une corporation déficitaire ayant de l'amortissement ou d'autres déductions non utilisés pouvait acquérir une corporation ayant un actif fiscal et transférer son actif à cette corporation, éliminant ainsi sa redevance fiscale et, dans certaines circonstances, récupérant l'impôt versé au cours des années antérieures.
Les principales modifications annoncées étaient les suivantes :
1) Des nouvelles règles exigeraient que l'année d'imposition d'une corporation se termine au moment d'un changement de contrôle subséquent au 15 janvier 1987 et limiteraient le recours aux pertes subies ou accumulées jusqu'à la fin de l'année visée — Cette règle se retrouve maintenant à l'alinéa 249(4)a) de la Loi et répute la fin de l'année d'imposition de la corporation immédiatement avant la date de l'acquisition de contrôle.
2) Des nouvelles règles seraient instaurées afin que les biens amortissables et les avoirs miniers qu'une corporation acquiert dans les 12 mois précédant un changement de contrôle soient réputés acquis après le changement — Ces règles se retrouvent maintenant aux paragraphes 13(24) et 66(11.4) de la Loi.
3) Une règle anti-évitement empêcherait l'utilisation des déductions et crédits d'impôt d'une tierce personne lors de la disposition d'un bien. Cette règle s'applique aux transactions subséquentes au 15 janvier 1987 et se retrouve au paragraphe 69(11) de la Loi.
4) Des nouvelles règles limiteraient l'utilisation des dépenses de recherches et de développement inutilisées lors d'un changement de contrôle subséquent au 15 janvier 1987 — Cette règle se trouve maintenant au paragraphe 37(6.1) et aux alinéas 37(1)h) et 12(1)v) de la Loi.
5) Des nouvelles règles limitant certaines transactions, notamment celles conçues de manière à contourner les règles de corporations remplaçantes s'appliquant aux compagnies minières étaient prévues avec effet au moment d'acquisitions d'avoirs et de changements de contrôle subséquents au 15 janvier 1987 (paragraphes 66.7(10) et (11) de la Loi).
Depuis l'entrée en vigueur des mesures contenues dans le Projet de loi C-64, il est devenu beaucoup plus important qu'auparavant d'identifier les situations qui donnent lieu à une acquisition de contrôle. Ce sujet a par ailleurs acquis une importance accrue avec la conjoncture économique des dernières années et l'accumulation de pertes dans certaines corporations. Le Ministère s'est depuis penché sur un certain nombre d'exemples touchant la question de contrôle que nous partagerons avec vous.
La Loi ne définit pas le mot "contrôle" aux fins de déterminer ce que constitut une acquisition de contrôle, et que le sens retenu par les tribunaux continue d'être généralement celui du contrôle de jure, c'est à dire la détention d'un nombre d'actions qui permet d'obtenir une majorité lors de l'élection du conseil d'administration. Rappelons également qu'une personne peut avoir le contrôle de droit d'une corporation sans posséder d'actions de cette corporation, à condition que cette personne contrôle une ou plusieurs autres corporations qui, seules ou avec d'autres, ont le contrôle par leur droit de vote de la première corporation. Un contribuable peut également, en vertu du paragraphe 256(8) de la Loi, être réputé avoir acquis des actions au fins de déterminer si le contrôle de la corporation a été acquis, s'il a acquis un droit visé à l'alinéa 251(5)b) de la Loi.
Pour les fins de la Loi, y a-t-il acquisition du contrôle d'une corporation («OP0») dans les situations suivantes :
Exemple 1
Un particulier, A, est propriétaire de 100 % des actions avec droit de vote d'Opco. A vend 50 % de ses actions d'Opco à un autre particulier, B, qui n'a aucun lien de dépendance avec A.
Position du Ministère
On considérera que le groupe composé de A et B a acquis le contrôle d'Opco si A et B ont suffisamment de liens et d'intérêts commerciaux pour qu'il soit raisonnable de présumer que A et B agissent de concert ou dans un intérêt commun en vue de contrôler Opco.
Un groupe de personnes est normalement considéré avoir acquis le contrôle d'une corporation lorsque ce groupe détient la majorité des actions avec droit de vote d'une corporation et qu'il existe des preuves de leur concertation ou de leur intention d'agir de concert, c'est-à-dire en toute solidarité dans des transactions ayant un objectif commun. Les personnes peuvent agir de concert ainsi en raison de leurs intérêts communs ou d'une entente entre eux.
Notons ici qu'une perte de contrôle par A n'équivaut pas nécessairement à une acquisition de contrôle pour le groupe composé de A et de B.
Exemple 2
A et B sont des frères et chacun est propriétaire de 50 % des actions avec droit de vote d'Opco. Les actions d'Opco qui appartiennent à B sont converties en actions sans droit de vote (c'est-à- dire, annulation des actions votantes et émissions de nouvelles actions non votantes).
Position du Ministère Suivant les modifications au paragraphe 256(7) contenues dans le Projet de loi C-18, devenu loi le 17 décembre 1991, nous considérons que A n'aura pas acquis le contrôle d'Opco puisque immédiatement avant le rachat, l'acquisition ou l'annulation des actions avec droit de vote que détenait B, A était lié à Opco.
Exemple 3 Un syndic en matière de faillite est nommé par un tribunal pour administrer les biens d'une corporation.
Position du Ministère
On considère qu'un syndic nommé par un tribunal pour administrer les affaires d'une corporation n'acquiert pas le contrôle de la corporation puisque le syndic ne possède pas le droit à la majorité des voix pour l'élection du conseil d'administration de la corporation.
Exemple 4
Pour les fins de la Loi, y a-t-il acquisition de contrôle des filiales (Filiale A, Filiale B, Opco A et Filiale C) de corporations remplacées (Publico 1 et Publico 2) dans la situation ci-après énoncée.
Les actions de Publico 1 et Publico 2 sont détenues par le public. Publico 1 et Publico 2 ne sont pas contrôlées par une personne ou un groupe de personnes. Publico 1 détient en propriété exclusive les actions de Filiale A et Filiale B. Filiale B détient en propriété exclusive les actions de Opco A. Publico 2 détient en propriété exclusive les actions de Filiale C. Publico 1 et Publico 2 sont fusionnées, selon les dispositions du paragraphe 87(1) de la Loi, pour former Fusionco.
Position du Ministère
Il y a une acquisition de contrôle. Le paragraphe 249(4) de la Loi s'appliquerait à Filiale A, à Filiale B, à Opco A et à Filiale C en conséquence de la fusion de Publico 1 et Publico 2. Le sous- alinéa 256(7)a)(iv) de la Loi ne s'appliquerait pas puisque Filiale A, Filiale B, Opco A et Filiale C ne sont pas liées à Publico 1 et Publico 2. Le paragraphe 249(4) de la Loi s'appliquera nonobstant le fait qu'aucune personne ou groupe de personnes ne contrôle Publico 1, Publico 2 ou Fusionco, selon le cas. Fusionco est une nouvelle corporation qui contrôle Filiale A, Filiale B, Filiale C et Opco A.
Exemple 5
Les exemples suivants devraient aider à illustrer la position du Ministère en ce qui concerne l'acquisition de contrôle d'une corporation par une personne ou un groupe de personnes.
a) La propriété de la Corporation X est détenue à 50 % par A et à 50 % par B. Ce dernier vend ses actions à C.
b) La propriété de la Corporation X est détenue par un groupe de 25 employés-actionnaires, la participation de chacun variant entre 1 % et 15 %. Un des employés vend ses actions à
1) un des autres employés-actionnaires,
2) un nouvel employé-actionnaire.
Position du Ministère
En règle générale, un groupe de personnes sera présumé avoir acquis le contrôle d'une corporation lorsque la preuve existe que ces personnes sont liées, ont un intérêt commun, ou agissent de façon concertée dans le but de contrôler la corporation. Dans les exemples qui précèdent, pour déterminer si un groupe de personnes a acquis le contrôle de la corporation, il faut examiner les faits de la situation. Si C agit de concert avec A pour exercer le contrôle de la corporation, le contrôle aura été acquis. Les autres exemples posent aussi une question de fait, à savoir s'il est possible d'identifier un groupe de personnes agissant ensemble pour exercer le contrôle de la corporation.
Exemple 6
Les corporations A et B ont fusionné le jour même où la corporation A a acquis le contrôle de la corporation B. Si aucun choix en vertu du paragraphe 256(9) de la Loi n'est produit, le contrôle de la corporation B sera considéré avoir été acquis au début de cette journée et l'année d'imposition de la corporation B sera réputée avoir pris fin immédiatement avant cette date, en vertu de l'alinéa 249(4)a) de la Loi. Au moment de la fusion, la fin de l'année d'imposition de la corporation B serait réputée prendre place immédiatement avant la fusion en vertu de l'alinéa 87(2)a) de la Loi. Dans cette situation, la corporation B aurait-elle une ou deux fins d'année d'imposition réputées en raison du changement de contrôle et de la fusion?
Position du Ministère
Comme il est expliqué au numéro 9 du Bulletin d'interprétation IT-74R, la fusion a lieu au premier instant de la date indiquée sur le certificat de fusion, à moins qu'un temps particulier ne soit pas précisé sur le certificat. Si la corporation A et la corporation B n'indiquent pas de temps particulier sur le certificat, la fusion a lieu au premier instant de la date indiquée sur le certificat. Comme il s'agit du même instant où la corporation A est réputée, selon le paragraphe 256(9) de la Loi, avoir acquis le contrôle de la corporation B, celle-ci n'aura qu'une fin d'année d'imposition en raison de l'acquisition de contrôle et de la fusion.
CONCLUSION
Le Bulletin d'interprétation IT-302R2 du 23 mai 1986 traitant des pertes et des effets des prises de contrôle fait présentement l'objet d'une révision et devrait être disponible sous peu.
LIEN DE DÉPENDANCE ET MANDAT
Richard S. Biscaro, C.A. Revenu Canada, Accise, Douanes et Impôt
2.1. — LIEN DE DÉPENDANCE
2.1.1. — REGLES DE BASE
La relation qui existe entre différentes personnes est importante pour les fins de la Loi de l'impôt sur lerevenu (ci-après la «Loi»). Les notions de lien de dépendance et de personnes liées sont utiles notamment dans les diverses dispositions suivantes :
39(1)c) perte au titre d'un placement d'entreprise 40(2)g)(ii) perte sur disposition de créance 55 présomption de gain en capital 69 contreparties insuffisantes 78 sommes impayées 88 règles sur les liquidations 112(3) à (4.3)pertes sur actions provenant de dividendes reçus 186 impôt de la Partie IV 212(1)b) retenues d'impôt 246 avantage conféré à un contribuable
Selon l'alinéa 251(1)a) de la Loi, des personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance.
Selon l'alinéa 251(1)b), la question de savoir si des personnes non liées n'avaient aucun lien de dépendance entre elles à une date donnée est une question de fait. Le paragraphe 11 du Bulletin d'interprétation IT-419 expose les critères suivants pour déterminer s'il y a ou non des liens de dépendance dans le cas de transactions :
a) l'existence d'une même personne qui dirige les négociations de deux parties à une transaction;
b) les parties à une transaction agissant de concert et n'ayant pas d'intérêts distincts;
c) le contrôle «de facto» (réel).
Ces critères sont fondés sur la jurisprudence. La définition de «personnes liées» apparaît à l'alinéa 251(2)a) de la Loi et elle comprend des particuliers unis par les liens du sang, du mariage et de l'adoption.
L'alinéa 251(2)b) de la Loi indique qu'une corporation est liée à une personne si cette personne est membre d'un groupe lié qui contrôle la corporation. Si la corporation est contrôlée par une personne, elle est liée à cette personne. Enfin, la corporation est liée à toute personne liée à une personne visée au sous-alinéa 251(2)b)(i) ou (ii) de la Loi.
En vertu de l'alinéa 251(6)b) de la Loi, des personnes sont unies par les liens du mariage si l'une est mariée à l'autre ou à une personne qui est ainsi unie à l'autre par les liens du sang. Cependant, dans l'arrêt Pembroke Ferry Ltd. c.MRN, le tribunal a maintenu qu'une femme n'est pas unie par mariage au père de son mari défunt car la relation de mariage disparaît à la mort d'un des conjoints.
De plus, le Ministère s'est déjà prononcé à l'effet que des époux, même s'ils vivent séparés en raison d'un échec de leur mariage, continueraient d'être unis par les liens du mariage jusqu'à ce qu'un décret de divorce soit émis par un tribunal.
2.1.2. — CONTROLE DE FAIT
Les tribunaux se sont déjà penchés sur la notion de contrôle de fait.
A titre d'exemple, dans l'arrêt M.R.N. c. Estate of T.R.Merritt, discutant du «cerveau dirigeant les négociations», le juge Cattanach mentionnait ce qui suit à la page 5165 :
«In my view, the basic premise on which this analysis is based is that, where the "mind" by which the bargaining is directed on behalf of one party to a contract is the same "mind" that directs the bargaining on behalf of the other party, it cannot be said that the parties are dealing at arm's length. In other words, where the evidence reveals that the same person was "dictating" the "terms of the bargain" on behalf of both parties, it cannot be said that the parties were dealing at arm's length».
De plus, le lien de dépendance et principalement le concept de relation de subordination («relationship of subordination») a aussi été discuté dans l'arrêt SpecialRisks Holdings Inc. c. La Reine. Dans cet arrêt, la vente d'un petit nombre d'actions votantes suffisant pour donner à l'acheteur le contrôle d'une corporation a été interprétée comme étant une transaction avec lien de dépendance entre le vendeur et l'acheteur. Mme le juge Reed a soutenu que Special Risks (l'acheteur) et le groupe «Hogg Robinson Group» (le vendeur) traitaient avec lien de dépendance car Special Risks contrôlait la corporation par l'abdication de «Hogg Robinson Group» d'exercer un intérêt indépendant et son accord sur les transactions n'était que pour accommoder Special Risks.
2.1.3. — CONTROLE DE FAIT C. CONTROLE DE JURE
La notion de contrôle de fait a été introduite dans la Loi par le Projet de loi C-139 qui a reçu la sanction royale le 13 septembre 1988. C'est à ce moment que le législateur a étendu la notion de contrôle de jure à celle de contrôle de fait.
Le paragraphe 256(5.1) de la Loi discute du contrôle de fait lorsque l'expression «contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit», est utilisée. Cette notion s'applique aux fins d'association de corporations.
Cependant, la notion de contrôle de fait, décrite au paragraphe 256(5.1) par l'expression «contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit», ne s'applique pas aux fins du paragraphe 251(2) (définition des «personnes liées»); celui-ci fait référence à la notion de contrôle de jure.
2.1.4. — SENS ÉLARGI DU MOT «CONTROLE»
La notion élargie du sens du mot «contrôle» en vertu du paragraphe 251(2) (définition du lien) et de l'alinéa 125(7)b) (corporation privée dont le contrôle est canadien) est discutée au paragraphe 251(5). On y traite de groupe lié, droit d'achat ou de rachat et de personne liée à elle- même.
2.1.5. — LIENS DE DÉPENDANCE ET FIDUCIES
Les notions de lien de dépendance et de mandat peuvent avoir un effet l'une sur l'autre dans certaines situations impliquant les fiducies et les sociétés. Pour ce qui est des fiducies, le Ministère considère les liens suivants comme des liens de dépendance :
a) les liens existant entre une fiducie et son auteur;
b) les liens existant entre un bénéficiaire et une fiducie; et
c) les liens existant entre une fiducie et l'avoir de cette fiducie (par exemple une corporation contrôlée par la fiducie).
2.1.6. — SOCIÉTÉS
En ce qui concerne les sociétés, on mentionne au paragraphe 15 du Bulletin d'interprétation IT-419 que :
«Lorsqu'un associé est en mesure de contrôler une société, qu'il détienne un intérêt majoritaire ou un mandat que lui ont remis ses associés, le Ministère considère que cette personne a des liens de dépendance avec la société. Toutefois, lorsqu'un associé n'est pas en mesure de contrôler une société dans laquelle il détient un intérêt et qu'il ne participe que très peu ou pas du tout à la direction des opérations de cette société, le Ministère peut considérer que cet associé n'a aucun lien de dépendance avec la société».
On indique aussi ce qui suit au paragraphe 16 :
«En règle générale, les associés sont présumés n'avoir aucun lien de dépendance entre eux dans le cas de transactions extérieures à leurs activités en tant qu'associés, bien que leur association puisse être un facteur dont il faut tenir compte dans le cas de toute autre transaction effectuée entre eux.»
2.2. — LE MANDAT
2.2.1 — LE POINT DE VUE CIVIL
L'article 1701 du Code civil du Bas-Canada définit le mandat ces termes :
«Le mandat est un contrat par lequel une personne, qu'on appelle le mandant, confie la gestion d'une affaire licite à une autre personne, qu'on appelle le mandataire, et qui, par le fait de son acceptation, s'oblige à l'exécuter.»
L'article 2130 du Code civil du Québec qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 1994 définit le mandat dans des termes un peu plus précis :
«Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le pouvoir de la représenter dans l'accomplissement d'un acte juridique avec un tiers, à une autre personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s'oblige à l'exécuter.»
Cette définition fait explicitement mention de l'acceptation du mandataire, de l'intervention d'un tiers et de la notion du pouvoir. Il s'agit d'éléments essentiels du mandat. Selon les Commentaires du Ministre de la Justice publiés chez Les publications du Québec, «la nouvelle définition permet de différentier plus aisément le mandat d'une série d'autres contrats avec lesquels il risque d'être aisément confondu, comme le contrat de service.»
L'article 2132 du Code civil du Québec prévoit que l'acceptation du mandat peut être expresse ou tacite. Le Code ajoute que l'acceptation est tacite lorsqu'elle s'induit des actes et même du silence du mandataire. Cet article reprend, en substance, le principe contenu au deuxième alinéa de l'article 1701 du Code civil du Bas-Canada.
2.2.2. — CONSÉQUENCES FISCALES D'UN MANDAT
Lorsqu'il y a une relation mandant-mandataire, les conséquences fiscales pour chacune des parties sont les mêmes que si les transactions étaient effectuées par le mandant lui-même.
2.2.3. — CAPACITÉ DU MANDANT
La jurisprudence a établi qu'une personne ne peut pas donner un mandat à une autre personne lui demandant de réaliser une transaction que le mandant n'aurait pas le droit de faire lui-même. Dans la cause Denison Mines Limited c.MRN, la corporation désirait héberger ses employés qui travaillaient à la mine. Toutefois, un tel hébergement allait à l'encontre d'une convention contractuelle. La corporation a alors décidé d'incorporer une filiale pour fournir les services d'hébergement. La filiale a réalisé des pertes et la corporation-mère a réclamé les pertes de sa filiale allégant que cette dernière était sa mandataire. La Cour a refusé l'argument de la corporation-mère à l'effet qu'il existait un mandat entre elle et sa filiale en rappelant qu'une personne ne peut pas faire par l'entremise d'un mandataire ce qu'elle ne pourrait pas faire elle-même. Les pertes que la corporation-mère a réclamées à l'égard de sa filiale lui ont donc été refusées.
2.2.4. — LA CORPORATION EN TANT QUE MANDATAIRE DE SESACTIONNAIRES
Dans la décision Salomon v. Salomon & Co., les tribunaux anglais ont indiqué qu'une corporation n'est pas, en soi, la mandataire de ses actionnaires.
Toutefois, les tribunaux canadiens, dans la décision Dominiom Bridge Company Limited c. La Reine, ont établi que la filiale de Dominiom Bridge était la mandataire de sa corporation-mère. Cette dernière avait incorporé une filiale aux Bahamas pour qu'elle effectue des achats d'acier dans d'autres pays.
Celle-ci revendait l'acier à sa corporation-mère en réalisant un profit substantiel. La Cour a constaté que toutes les activités de la filiale étaient contrôlées par la corporation-mère et a conclu que l'entreprise de la filiale était en réalité l'entreprise de la corporation-mère.
La Cour a alors appliqué six critères, énoncés dans la décision Smith, Stone and Knight Ltd. v. Lord Mayor,Aldermen and Citizens of the city of Birmingham. Ces critères peuvent se résumer ainsi :
a) Le profit de la filiale a-t-il été considéré comme le profit de la corporation-mère?
b) Est-ce que les personnes qui dirigent les affaires de la filiale ont été nommées par le corporation- mère?
c) Est-ce que la corporation-mère est la tête dirigeante des activités commerciales de la filiale?
d) Est-ce que la corporation-mère dirige l'aventure commerciale, décide ce qui doit être fait et quels capitaux doivent être investis dans la filiale?
e) Est-ce que la filiale réalise ses profits par ses propres moyens et avec l'aide de sa propre direction?
f) Est-ce que la filiale est constamment contrôlée et est-ce que ce contrôle produit les résultats attendus?
Dans la décision The Alberta Gaz Ethylene Co. Ltd. c. LaReine, le Ministère demandait à la contribuable de verser la retenue d'impôt exigible en vertu de la Partie XIII de la Loi à l'égard des paiements d'intérêt que la contribuable avait versés à ASCO, sa filiale américaine. Cette dernière avait été constituée afin de contracter un prêt pour la contribuable auprès d'une banque américaine. Durant les négociations avec la banque, la contribuable avait été avisée que le taux d'intérêt sur le prêt serait moins élevé si le prêt était fait à une corporation américaine. D'où, l'incorporation d'ASCO aux États-Unis.
Sur la question du mandat, la Cour a formulé le commentaire suivant :
«In any event, an agent can not accomplish on behalf of a principal that which the principal itself could not legally accomplish (...). The plaintiff itself could not have obtained the loan which ASCO obtained from the U.S. lenders. The plaintiff would have had to pay a higher interest rate. In such circumstances, ASCO cannot be said to be merely the agent of the plaintiff vis-à-vis the U.S. lenders. For the same reason, ASCO's business vis-à-vis the U.S. lenders can not be said to be merely the business of the plaintiff. Accordingly, I think it would be incorrect to ignore the existence of ASCO for Part XIII taxes and find as a fact that the loan in question was between the plaintiff and the U.S. lenders directly.»
La Cour fédérale d'appel a confirmé la décision de la Section de première instance et a ajouté le commentaire suivant :
«First, in addition to the reason given by the Trial Judge for rejecting the appellant's agency argument, we would say that ASCO could not have been the agent of the appellant since there can be no doubt that the various contracts entered into created rights and obligations that were personal to ASCO vis-à-vis the third parties. It is of the essence of agency that the agent, acting within the scope of his mandate and with the knowledge of the parties with whom he contracts, binds his principal only; if he binds himself as well he is to that extent not an agent but a principal.»
Le Ministère admet que dans certains cas une corporation peut agir en tant que mandataire de ses actionnaires. Le Bulletin d'interprétation IT-216 indique qu'une corporation peut administrer, en tant que mandataire d'un actionnaire, des biens qui ont été acquis précisément pour être administrés de cette façon, en autant que l'intention des parties a été clairement établie. Quand la situation est telle, la corporation est regardée comme un mandataire de l'actionnaire alors que ce dernier est considéré comme le propriétaire réel des biens. En ce qui concerne l'actionnaire, tous les revenus ou pertes, seront alors considérés comme le revenu ou la perte de l'actionnaire, indépendamment du fait que des montants reçus aient été ou non transférés à l'actionnaire ou, dans le cas d'une perte, que la corporation ait été remboursée ou non. L'actionnaire pourra aussi réclamer la déduction pour amortissement que la Loi autorise ou toutes pertes finales.
2.2.5. — LES CONTRE-LETTRES
Si la relation mandant-mandataire implique l'existence d'une contre-lettre, le Ministère appliquera les règles de droit qui s'appliquent dans la province à l'égard de la contre- lettre.
2.3. — CONCLUSION
L'alinéa 251(1)a) de la Loi précise que des personnes liées sont réputées avoir entre elles des liens de dépendance. Dans le cas des personnes qui ne sont pas liées entre elles, au sens de l'alinéa 251(1)a), la Loi prévoit qu'il s'agit d'une question de fait.
De même, une analyse de la jurisprudence nous permet de conclure que la question de savoir si une relation mandant- mandataire existe entre des parties est essentiellement une question de fait qui ne peut être résolue qu'en tenant compte de toutes les circonstances.
LES PRINCIPES COMPTABLES GÉNÉRALEMENT RECONNUS («PCGR»)
Richard S. Biscaro, C.A. Revenu Canada, Accise, Douanes et Impôt
En vertu de l'article 3 de la Loi de l'impôt sur lerevenu (la «Loi»), un contribuable, en calculant son revenu pour une année d'imposition, doit inclure son revenu tiré de chaque entreprise et chaque bien, où que cette entreprise ou ce bien soit situé.
L'article 9 de la Loi stipule que, sous réserve des dispositions de la Partie I de la Loi, le revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition est le bénéfice qu'il en tire pour cette année. La Loi ne contient aucune disposition à l'effet que le bénéfice provenant d'une entreprise doive être calculé conformément aux PCGR.
La Cour suprême dans Dominion Taxi Cab Association c.MRN affirmait :
«The expression "profit" is not defined in the Act. It has not a technical meaning and whether or not the sum in question constitutes profit must be determined on ordinary commercial principles unless the provisions of the Income Tax Act require a departure from such principles.»
Lors du «1981 Corporate Management Tax Conference», le Ministère a pris la position suivante :
«The basic position of the Department is that the profit or loss from a business for purposes of section 9 of the Income Tax Act should be determined in accordance with generally accepted accounting principles unless specific provisions of the Act require a departure therefrom, and it is believed that the courts are generally supporting this position.
When more than one set of generally accepted accounting principles would be appropriate in determining the profit or loss for a particular business, it is the Department's view that the set utilized by the taxpayer for financial purposes should also be used for tax purposes.»
Le Bulletin d'interprétation IT-473 contient des exigences semblables en matière de comptabilisation des stocks pour fins comptables et fiscales (voir paragraphes 4, 8, et 16). Le Bulletin d'interprétation IT-95R stipule que le Ministère acceptera toute méthode utilisée pour déterminer les gains ou les pertes sur change étranger pourvu que cette méthode soit, dans les circonstances, conforme aux principes comptables généralement reconnus.
Les négociants importants et les corporations commerciales emploient normalement la comptabilité d'exercice plutôt que la comptabilité de caisse dans le calcul de leur revenu d'entreprise. La comptabilité d'exercice est généralement considérée comme reflétant de façon plus adéquate le bénéfice d'entreprise que la comptabilité de caisse. Le Bulletin d'interprétation IT-417R stipule que les contribuables sont généralement tenus d'utiliser cette méthode pour calculer le revenu tiré d'une entreprise ou d'un bien aux fins de l'article 9 de la Loi.
La jurisprudence récente est venue quelque peu modifier cette approche.
Aux fins de déterminer le bénéfice qu'un contribuable tire d'une entreprise ou d'un bien, Madame le juge Reed dans l'affaire Maritime Telegraph and Telephone Company,Limited a retenu la méthode qui permettait d'avoir «une image plus fidèle» du revenu du contribuable :
«Il ressort clairement de la preuve que les deux méthodes susmentionnées sont conformes aux principes comptables généralement reconnus. Par ailleurs, même si quelques certains (sic) éléments de preuve montrent que certaines entreprises de services publics emploient la méthode du montant facturé, aucun ne permet de conclure qu'une seule grande société canadienne de téléphone emploie la méthode du montant facturé, aux fins de ses états financiers généraux. En outre, il est juste de conclure que la méthode du montant gagné donne une image plus "fidèle" du revenu de l'entreprise pour l'année en question si on la compare à la méthode du montant facturé. L'entreprise de la demanderesse consiste à fournir un service continu qui, par sa nature même, donne lieu à un revenu qui s'accroit quotidiennement.»
Cette position a été retenue par la Cour d'appel fédérale dans la décision West Kootenay Power and Light Company,Limited c. La Reine :
«Il n'est pas souhaitable, à mon avis, d'ériger la conformité entre les états financiers et les déclarations de revenus en exigence absolue, et j'ai la conviction que ce n'est pas ce que font les décisions précitées. Elles établissent plutôt que la méthode applicable est celle qui donne l'image la plus fidèle du revenu du contribuable, qui le représente le plus fidèlement et proprement et qui permet le meilleur "rattachement" des charges et des produits.»
«Souvent, le résultat obtenu ne différera pas de celui auquel on serait parvenu en appliquant le principe de la continuité, mais la méthode de "l'image la plus fidèle" ou du "rattachement" n'aboutit pas à des effets absolus et exige un examen factuel minutieux de la situation du contribuable.»
Les PCGR ont été établis à des fins bien particulières. Dans certains cas, une entreprise peut choisir entre plusieurs méthodes comptables, toutes aussi valables les unes que les autres. Dans d'autres cas, des états financiers sont établis en conformité à une réglementation. Ces états financiers servent des fins bien particulières, notamment pour établir la tarification, comme c'est la cas pour les entreprises de téléphone, d'électricité ou de gaz. Ces états financiers ne présentent peut-être pas l'image la plus fidèle. Comme l'a souligné la Cour d'appel fédérale, il faut effectuer un examen factuel minutieux de la situation du contribuable.
Concernant les causes anglaises GallaghervJones et Threlfall v Jones, la décision rendue par la Chancery Division en janvier 1993 a été renversée par la Court of Appeal, le 30 juin 1993, et les contribuables ont obtenu la permission d'en appeler à la House of Lords. La cause devait être entendue le 30 septembre 1993. Tant que les tribunaux canadiens n'auront pas interprêté la décision de la House of Lords, Revenu Canada entend maintenir la position établie fondée sur l'interprétation des tribunaux canadiens en matière d'application des principes comptables généralement reconnus.
La position du Ministère demeure telle qu'énoncée en 1981, à savoir que le bénéfice aux fins de l'article 9 de la Loide l'impôt sur le revenu doit être établi en conformité des principes comptables généralement reconnus, à moins de dispositions contraires expresses dans la Loi, en tenant compte de la méthode de «l'image la plus fidèle» et du principe du «rattachement des produits et des charges».
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