Hall,
J.
(tous
souscrivent)
:—L’appelant
en
appelle
du
Jugement
de
la
Cour
de
l’Exchiquier
du
Canada
prononcé
le
septième
jour
de
mars,
1966
par
l’Honorable
Juge
Kearney
maintenant
l’appel
de
l’intimé,
le
Ministre
du
Revenu
National,
de
la
décision
de
la
Commission
d’Appel
de
l’impôt
concernant
les
cotisations
établis
par
le
Ministre
pour
les
années
d’imposition
1958
et
1959
de
l’appelant.
La
seule
question
en
litige
dans
cet
appel
est
celle
de
savoir
si
les
sommes
de
$15,000
et
de
$19,136.20
reçues
par
l’appelant
en
1958
et
1959
respectivement,
suivant
les
termes
d’un
contrat
de
vente
peuvent
raisonablement
être
considérées
comme
ayant
été
reçues
par
l’appelant
à
titre
d’intérêt
conformément
aux
dispositions
de
l’article
7(1)
de
la
Loi
de
l’impôt
sur
le
Revenue,
S.C.R.
1952,
c.
148.
L’appelant
était
propriétaire
d’une
ferme,
située
dans
la
paroisse
de
St-Laurent,
depuis
une
vingtaine
d’années.
Il
a
habité
et
habitait
encore
au
moment
de
la
vente,
une
maison
située
sur
la
ferme,
et
il
a
exploité
cette
ferme
pendant
plusieurs
années
et
ce
jusqu’en
1952.
De
1950
à
1956,
l’appelant
fut
approché
par
différentes
personnes
pour
vendre
sa
ferme
mais
refusa
toutes
ces
offres
car
il
ne
voulait
pas
aux
conditions
qui
lui
étaient
faites
se
départir
de
cette
ferme
qu’il
avait
exploitée
si
longtemps.
Or,
vers
le
20
juillet
1956,
alors
que
la
valeur
des
terres
était
à
la
hausse,
l’appelant
fut
approché
par
une
compagnie
du
nom
de
Thorndale
Investment
Corporation
avec
laquelle
il
traitait
à
distance,
qui
lui
présenta
une
offre
d’achat
au
montant
de
$350,000.
Il
refusa
l’offre
encore
une
fois,
déclarant
qu’il
voulait
$450,000
pour
sa
ferme.
Dans
les
deux
Jours
qui
suivirent,
des
négociations
intenses
eurent
lieu
entre
l’appelant
et
Thorndale
Investment
Corporation.
En
effet,
l’appelant
a
commencé
par
demander
$450,000
alors
que
Thorndale
Investment
Corporation
offrait
$350,000.
Après
discussion,
l’appelant
diminua
alors
son
prix
à
$400,000;
mais
ce
prix
fut
jugé
trop
élevé
par
l’acheteur.
L’appelant
consentit
enfin
une
réduction
additionnelle
de
$5,000
qui
ne
fut
pas
considérée
comme
suffisante
par
la
compagnie
acheteuse.
L’appelant
a
donc
décidé
de
laisser
tomber
l’intérêt
afin
de
conclure
la
vente.
Un
contrat
notarié
fut
signé
le
19
juillet
1956
par
lequel
M.
Groulx
vendit
une
grande
partie
de
sa
ferme
soit
une
superficie
totale
de
2,256,859
pieds
carrés
à
Thorndale
Investment
Corporation
pour
un
prix
de
$395,000
soit
$0.17742
le
pied
carré,
dont
$85,000
comptant
et
le
solde
de
$310,000
payable
avant
le
ler
juin
1964,
par
versements
annuels
commençant
en
1958.
Le
solde
ne
portait
pas
d’intérêt
à
moins
de
retard
dans
les
versements
et
alors
l’intérêt
était
de
6%.
Les
principales
clauses
du
contrat
de
vente
pertinentes
au
litige
sont
les
suivantes
:
(a)
The
present
Sale
is
thus
made
for
the
price
or
sum
of
Three
hundred
and
ninety-five
thousand
dollars
($395,000),
on
account
whereof
the
Vendor
acknowledges
to
have
received
from
the
Purchaser
the
sum
of
Eighty-five
thousand
dollars
($85,000)
whereof
quit
for
so
much.
The
balance
of
price,
namely
the
sum
of
Three
hundred
and
ten
thousand
dollars
($310,000)
the
Purchaser
obliges.
itself
to
pay
to
the
Vendor
as
follows:—
Fifteen
thousand
dollars
($15,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
fifty-eight;
Twenty-five
thousand
dollars
($25,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
fifty-nine;
Fifty
thousand
dollars
($50,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
sixty;
Fifty
thousand
dollars
($50,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
sixty-one;
Fifty
thousand
dollars
($50,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
sixty-two;
Fifty
thousand
dollars
($50,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
sixty-three;
and
Seventy
thousand
dollars
($70,000)
on
the
first
day
of
June,
nineteen
hundred
and
sixty-four.
(b)
The
purchaser
shall
have
the
right
to
increase
the
amount
of
any
payment
or
to
make
payments
on
account
or
pay
the
entire
balance
at
any
time.
(c)
The
said
balance
of
price
shall
not
bear
any
interest
if
the
said
instalments
are
paid
on
or
before
their
due
dates,
but
any
instalment
not
paid
on
its
due
date
shall
bear
interest
at
the
rate
of
six
per
centum
(6%)
per
annum
from
such
due
date
and
compounded
half-yearly
but
not
in
advance
until
paid.
(d)
Should
however,
the
Purchaser
pay
any
instalment
above
set
forth
before
its
due
date,
it
will
be
entitled
to
a
discount
calculated
at
the
rate
of
five
per
cent
(5%)
per
annum
from
the
date
upon
which
payment
is
made
to
the
respective
due
date.
Dans
ses
motifs
de
jugement,
le
savant
juge
de
la
Cour
de
l’Echiquier
a
dit:
.
.
.
nous
avons
ici
à
traiter
plus
particulièrement
de
deux
questions
de
faits.
Premièrement,
le
Ministre
était-il
justifiable
de
prétendre
que,
si
le
contribuable
avait
suivi
en
l’occurence
une
pratique
bien
reconnue
dans
le
monde
des
affaires,
la
balance
de
$310,000,
payable
par
versements,
aurait
porté
intérêt
au
taux
de
5%
ou
6%
jusqu’à
ce
que
cette
dette
fut
entièrement
payée?
La
réponse
affirmative
à
cette
question
ne
fait
aucun
doute,
puisqu’elle
n’est
pas
contestée.
Au
surplus,
je
suis
d’opinion
que
la
preuve
établie
par
l’appelant
démontre
que
c’est
presque
toujours
la
pratique
dans
les
cas
analogues
pour
toute
balance
de
prix
garantie
par
hypothèque,
de
porter
intérêt
à
5%.
Par
voie
de
défense,
l’intimé
prétend
que,
nonobstant
l’admission
qu’en
règle
générale
les
taux
d’intérêt
ci-haut
mentionnés
s’imposent,
il
s’agit
ici
d’un
cas
d’espèce
comportant
une
circonstance
spéciale
et
que,
par
conséquent,
elle
mérite
considération
exceptionnelle.
A
l’appui
de
cette
prétention,
l’intimé
déclare
qu’il
n’a
pas
suivi
la
coutume
de
charger
l’intérêt
parce
que
sa
ferme
ne
produisait
rien.
La
seconde
question
à
résoudre
est
celle
de
savoir
si
la
preuve
laisse
croire
que
la
propriété
a
été
vendue
à
un
prix
supérieur
à
sa
valeur
marchande.
Le
procureur
de
l’appelant
a
admis
que
la
méthode
employée
par
M.
Lemire
pour
établir
que
la
propriété
a
été
vendue
à
une
valeur
supérieure
à
sa
valeur
marchande
lui
paraît
peut-être
boiteuse
à
certains
points
de
vue,
parce
qu’il
a
procédé
sur
la
base
de
son
expérience
et
ne
connaissait
pas
la
définition
“valeur
marchande”
donnée
par
la
Cour
Suprême.
Toutefois,
il
a
soumis
que
ceci
ne
voulait
pas
dire
que
ses
évaluations
étaient
erronnées.
En
tout
cas,
les
directives
indiquées
par
la
Cour
Suprême
ne
m’interdisent
pas
d’analyser,
au
meilleur
de
mes
capacités,
les
témoignages
de
M.
Lemire
afin
d’en
déduire
des
indices
valables
de
la
valeur
réelle
de
cette
propriété.
De
plus,
je
considère
dans
les
circonstances,
que
c’est
notre
devoir
d’agir
ainsi.
En
appel
d’un
jugement
rendu
par
la
Cour
Suprême
du
Nouveau-Brunswick
dans
The
King
v.
Jones,
[1950]
S.C.R.
220,
289,
où
il
s’agissait
de
taxation
et
du
principe
applicable
à
l’évaluation
de
certaines
terres
boisées,
dans
les
notes
de
l’honorable
Juge
Rand,
parlant
pour
la
Cour,
on
trouve,
entre
autres,
les
observations
suivantes
:
“The
figure
of
$5
an
acre
was
the
average
price
estimated
by
the
assessors
from
their
local
knowledge
of
sales
of
small
holdings,
such
as
100
acre
lots.
It
was
said
that
these
sales
ran
from
$3
to
$8
an
acre,
and
that
$5
was,
therefore
a
fair
valuation.
In
this
the
assessors
were
undoubtedly
wrong.
Each
taxpayer
is
entitled
to
have
the
value
of
his
property
separately
ascertained.
The
difference
in
the
prices
used
might
possibly
have
arisen
from
differences
in
time
and
market
conditions
rather
than
in
real
marketable
worth,
in
which
case
the
propriety
of
the
amount
would
depend
upon
equivalence
in
value,
in
the
absence
of
which
throughout
the
parish
an
average
figure
could
not
be
used.
But
such
a
figure
is
obviously
to
be
distinguished
from
an
average
valuation
of
a
large
tract
of
land
belonging
to
one
taxpayer
and
exhibiting
wide
variations
in
the
value
of
its
several
parts.
But
the
Judge
in
appeal
considered
the
assessment
de
novo
in
all
its
aspects.
Rejecting
the
principle
in
the
inadequate
form
urged
by
the
company,
he
properly
construed
the
Statute
to
provide
for
valuation
on
a
market
basis,
as
between
a
willing
seller
and
a
willing
purchaser,
each
exercising
a
reasonable
judgment,
having
regard
to
all
elements
and
potentialities
of
value
as
well
as
of
all
risks,
and
reducing
them
all
to
a
present
worth:
Montreal
Island
Power
Co.
v.
The
Town
of
Laval
des
Rapides,
[1935]
S.C.R.
304.
He
found
that
$5
was
not
in
excess
of
the
fair
value
of
the
land.”
Il
n’est
pas
contesté
que
la
question
qui
se
pose
est
celle
de
déterminer
la
valeur
marchande
ou
réelle
de
la
propriété.
Je
suis
d’abord
d’opinion
que
l’appelant
a
au
moins
établi
une
cause
prima
facie
que
la
propriété
a
été
vendue
à
un
prix
supérieur
à
sa
valeur
marchande
et
que
l’intimé
n’a
pas
réussi,
comme
il
lui
incombait,
à
prouver
le
contraire.
A
mon
avis,
l’intimé
n’était
pas
un
fermier
ordinaire.
Comme
il
appert
de
ses
déclarations
de
revenus
imposables
transmises
à
cette
Cour,
son
revenu
taxable
pour
l’année
1958
excédait
$12,500,
alors
que
pour
1959
il
était
de
$15,000.
Il
recevait
une
partie
de
ces
montants
à
titre
de
salaire
d’une
compagnie
dont
il
était
le
président,
mais
la
majeure
partie
venait
de
ses
investissements.
Son
témoignage
révèle
que
les
transactions
immobilières
ne
lui
étaient
pas
étrangères.
Quant
à
sa
déclaration
de
n’avoir
jamais
songé
à
la
taxe
évitée
en
renoncant
à
l’intérêt,
un
enfant
pourrait
calculer
que
l’intérêt
à
5%
sur
une
balance
de
prix
de
$310,000
excédait
$15,000
par
année.
Un
contribuable
aussi
entraîné
aux
affaires
que
l’intimé,
devrait
apprécier
d’emblée
l’avantage
pécuniaire
de
ne
pas
majorer
du
double
son
revenu
taxable.
La
loi
sur
l’intérêt,
S.R.
1952,
vol.
III,
c.
156,
s.
2,
édicte
que:
“Sauf
disposition
contraire
de
la
présente
loi
ou
de
toute
autre
loi
du
Parlement
du
Canada,
une
personne
peut
stipuler,
allouer
et
exiger,
dans
tout
contrat
ou
convention
quelconque,
le
taux
d’intérêt
ou
d’escompte
qui
est
arrêté
d’un
commun
accord.
L’intimé,
je
crois,
a
révélé
qu’en
sacrifiant
l’intérêt
son
intention
avait
été
de
s’assurer
un
prix
de
$395,000
en
capital—et
son
témoignage
ne
pouvait
guère
créer
un
état
de
choses
caractérisant
mieux
une
capitalisation
des
intérêts.
On
peut
ajouter
que
des
circonstances
supplémentaires—nommément
le
fait
que
c’est
l’intimé
lui-même
qui
a
proposé
le
non
paiement
d’intérêt,
la
faiblesse
des
raisons
pouvant
motiver
ce
geste
et
les
réponses
indéfinies
données
par
M.
Feinstein
à
la
question
de
savoir
s’il
aurait
payé
le
prix
de
$395,000
n’eut
été
la
fait
qu’il
se
trouvait
dispensé
de
payer
l’intérêt—militent
contre
l’intimé.
Je
crois
devoir
conclure
alors
qu’il
y
a
suffisamment
de
preuve
pour
justifier
les
cotisations
dont
il
s’agit.
La
preuve
justifie
pleinement
les
conclusions
auxquelles
l’Honorable
Juge
Kearney
en
est
arrivé
quant
aux
faits.
L’appel
est
rejeté
et
le
jugement
de
la
Cour
de
l’Echiquier
est
confirmé
avec
dépens
contre
l’appelant.