MONTPETIT,
J.:—Attendu
que
les
requérants,
dans
leur
pétition
de
droit
qui
a
été
dûment
reçue
le
26
mai
1951,
sous
le
seing
du
lieutenant-gouverneur
de
la
province
de
Québec,
demandent
à
la
Cour
de
recommander
et
d’ordonner
à
Sa
Majesté
le
Roi
et
maintenant
—
selon
l’accord
des
procureurs
au
dossier
—
à
Sa
Majesté
la
Reine
agissant
aux
droits
de
la
province
de
Québec
de
leur
rembourser
la
somme
de
$22,094.52
que,
selon
eux,
ils
ont
payée
en
trop
comme
partie
des
droits
de
succession
exigés
par
le
percepteur
du
revenu
provincial
à
la
suite
du
décès
de
M.
D.
A.
Campbell,
survenu
le
20
août
1950;
Attendu
que
Sa
Majesté
la
Reine
soumet
que
les
percepteur
du
revenu
provincial
était
justifié,
en
vertu
de
la
Loi
des
droits
sur
les
successions,
d’exiger
ce
montant
de
la
succession
de
feu
D.
A.
Campbell
et
qu’il
n’y
a
pas
lieu
de
le
remettre
aux
requérants
;
Considérant
que
les
faits,
dans
la
présente
instance,
ne
souffrent
guère
de
discussion
sérieuse
et
peuvent
se
résumer
ainsi:
(a)
Au
cours
de
l’année
1917,
D.
A.
Campbell,
alors
gérant
général
de
Campbell
Flour
Mills
Company
Limited,
obtint
l’émission
de
trois
polices
d’assurance
sur
sa
vie
pour
une
somme
globale
de
$100,000
et
au
bénéfice
de
ladite
compagnie.
(b)
Pendant
un
peu
plus
de
dix
années,
la
compagnie
bénéficiaire
paya
toutes
les
primes
dues
sur
ces
trois
polices.
(c)
Le
21
octobre
1927,
l’une
des
requérants,
madame
Dorothea
Owen
Turner,
épouse
de
D.
A.
Campbell,
remit
à
Campbell
Flours
Mills
Company
Limited
la
valeur
de
rachat
de
ces
trois
polices,
telle
qu’alors
établie
à
$18,701.19.
(d)
En
considération
de
ce
payement,
ladite
compagnie
transporta
à
madame
Turner
tous
les
droits,
titres
et
intérêts
qu’elle
avait
ou
pouvait
avoir
en
vertu
de
ces
polices.
(e)
A
compter
de
ce
jour,
madame
Turner
acquitta
toutes
les
primes
exigibles
sur
ces
polices
d’assurance.
(f)
Tel
que
noté
plus
haut,
D.
A.
Campbell
mourut
le
20
août
1950
et
le
percepteur
du
revenu
provincial
exigea
des
exécuteurs
testamentaires
de
la
succession
(qui
sont
deux
des
requérants)
de
payer
des
droits
de
succession
sur
ces
trois
polices,
à
savoir,
$22,094.52.
(g)
Les
exécuteurs
testamentaires,
après
discussion,
se
conformèrent
aux
exigences
du
percepteur
et
payèrent
ce
montant,
sans
préjudice
et
sous
réserve
de
tous
leurs
droits.
Considérant
que
l’exigibilité
ou
non
de
droits
de
succession
dans
le
cas
présent
dépend
entièrement
de
l’interprétation
qu’il
incombe
de
donner
à
l’article
27
de
la
Loi
des
droits
sur
les
successions
(S.R.Q.
1941,
c.
80)
tel
qu’amendée
par
l’article
6
de
la
loi
13
George
6,
c.
32
;
Considérant
que
cet
article
27
se
lit
ainsi
(la
Cour
ne
cite
que
les
parties
pertinentes
de
cet
article):
:
_
“1.
Nonobstant
toute
disposition
de
toute
autre
loi,
sont
réputés
des
biens
dont
la
propriété,
l’usufruit
ou
la
jouissance
est
transmis
par
le
décès
de
la
personne
à
raison
du
décès
de
laquelle
elles
deviennent
payables
:
(a)
Les
sommes
dues
en
vertu
de
polices
d’assurance
sur
la
vie
effectuées
ou
appliquées
d’après
les
dispositions
de
l’art.
3
de
la
Loi
de
l’assurance
des
maris
et
des
parents
(ce.
301)
;
et
(b)
Toutes
autres
sommes
d’argent
dues
par
un
assureur,
à
raison
du
décès
d’une
personne
dont
il
a
assuré
la
vie,
lorsqu’elles
sont
dévolues
à
titre
gratuit
.
.
.
3.
N’est
pas
censée
dévolue
à
titre
gratuit
la
somme
d’argent
due
par
un
assureur,
à
raison
du
décès
de
la
personne
décédée,
payable
à
un
bénéficiaire
ou
à
un
cessionnaire
qui
(a)
justifie
avoir
payé
lui-même
toutes
les
primes,
sans
avances,
ni
remboursement
quelconque
de
qui
que
ce
soit;
(b)
garde
pour
son
bénéfice
exclusif
la
totalité
de
ladite
somme
;
(c)
n’est
pas,
par
rapport
à
la
personne
décédée,
l’une
des
personnes
visées
au
par.
1
de
l’art.
9
de
la
présente
loi.”
Considérant
qu’en
vertu
de
la
règle
particulière
énoncée
dans
le
sous-paragraphe
(b)
du
paragraphe
premier
de
cet
article,
les
sommes
d’argent
dues
par
un
assureur,
à
raison
du
décès
de
l’assuré,
ne
sont
considérées
comme
biens
taxables
qu’en
tant
que
ces
sommes
ont
été
dévolues
à
titre
gratuit;
Considérant
que
la
somme
de
$100,000,
qui
était
due
par
les
compagnies
d’assurance
intéressées,
lors
du
décès
de
Campbell,
n’a
pas
été
dévolue
à
la
requérante,
dame
Turner,
à
titre
gratuit,
puisqu’elle
en
est
devenue
bénéficiaire
en
payant,
le
21
octobre
1927,
la
valeur
de
rachat
des
polices
en
question
à
Campbell
Flour
Mills
Company
Limited
et
en
acquittant
personnellement,
depuis
lors
et
jusqu’au
décès
de
son
mari,
toutes
les
primes
annuelles
exigible
en
vertu
de
ces
polices;
Considérant
que
le
troisième
paragraphe
de
l’article
27
a
uniquement
pour
but—même
si
le
langage
employé
laisse
à
désirer—
non
pas
de
formuler
une
exception
à
la
règle
énoncée
dans
le
premier
paragraphe,
mais
de
disposer
d’un
cas
particulier
où
il
ne
pourra
pas
être
dit
qu’il
y
a
présomption
d’une
dévolution
à
titre
gratuit
;
Considérant
que
ce
troisième
paragraphe
n’a
pas
pour
effet
de
restreindre
la
portée
de
la
règle
adoptée
dans
le
premier
paragraphe
;
Considérant
que
le
fait
pour
un
bénéficiaire
quelconque
de
ne
pouvoir
démontrer
qu’il
tombe
sous
l’effet
des
trois
conditions
prévues
dans
ce
troisième
paragraphe
ne
le
prive
pas
du
droit
d’établir
par
tous
autres
moyens
et
ce,
en
vertu
des
dispositions
du
premier
paragraphe
de
l’article
27,
que
les
sommes
qui
lui
sont
dues
par
un
assureur
à
raison
du
décès
de
la
personne
dont
il
a
assuré
la
vie
ne
lui
sont
pas
dévolues
à
titre
gratuit
et
ne
sont,
par
conséquent,
pas
taxables
selon
la
loi
des
droits
sur
les
successions
;
Considérant
que
le
législateur,
s’il
eût
voulu
qu’il
en
fût
autrement,
n’aurait
pas
manqué
de
déclarer
en
termes
exprès—
ce
qu’il
n’a
pas
fait—qu’un
bénéficiaire,
pour
prétendre
à
une
dévolution
onéreuse
et
pour
éviter
ainsi
la
taxe,
devrait
prouver
que
son
cas
est
exclusivement
régi
par
les
dispositions
du
troisième
paragraphe
de
l’article
27;
Considérant,
même
s’il
est
vrai
que,
d’après
l’article
41
du
c.
1
des
S.R.Q.
1941,
intitulé
‘‘Loi
d’interprétation’’,
un
statut
“doit
recevoir
une
interprétation
large,
libérale,
qui
assure
l’accomplissement
de
son
objet
et
l’exécution
de
ses
prescriptions
suivant
leur
véritable
sens,
esprit
et
fin’’,
il
n’en
demeure
pas
mois,
selon
une
jurisprudence
bien
établie,
qu’en
matière
de
législation
fiscale,
il
incombe
aux
tribunaux
de
s’en
tenir
à
la
lettre
des
dispositions
adoptées
et
non
pas
en
étendre
le
sens
et
la
portée
par
présomption
ou
par
inférence
ou
même
selon
ce
qui
peut
sembler
être
l’esprit
de
la
loi.
Partington
v.
Attorney-General
(1869),
4
L.R.H.L.
100,
122;
Lord
Advocate
v.
Fleming,
[1897]
A.C.
145,
152;
Tennant
v.
Smith,
[1892]
A.C.
190,
154;
Royal
Insurance
Company
v.
City
of
Montreal
(1906),
29
3.8.
161;
City
of
Westmount
v.
M.L.H.P.
(1910),
44
S.C.R.
364;
Segal
v.
City
of
Montreal,
[1931]
S.C.R.
460;
Crawford
v.
Spooner
(1846),
6
Moo.
P.C.
9;
The
Queen
v.
J.
C.
Ayer
(1887),
1
Ex.
C.R.
232,
270;
Minister
of
Customs
v.
Charest
(1927),
33
R.
de
J.
1
;
Minister
of
Customs
and
Excise
v.
Bank
of
Hoche-
laga
(1925),
40
K.B.
138
;
Fasken
Estate
v.
M.N.R.,
[1948]
C.T.C.
265,
275;
Attorney-General
v.
Peek,
[1912]
2
K.B.
192;
Royal
Trust
Company
v.
The
King
(1941),
79
S.C.
241,
244.
Considérant
que
la
pétition
de
droit
des
requérants
est
bien
fondée
en
faits
et
en
droit
;
Par
ces
motifs
le
Tribunal
accueille
la
pétition
de
droit
des
requérants
avec
dépens
et
recommande
à
Sa
Majesté
la
Reine
agissant
aux
droits
de
la
province
de
Québec
de
payer
aux
requérants
la
somme
de
$22,094.
52,
avec
intérêts
à
compter
de
ce
jour,
et
les
dépens.