Noel,
J.:—Le
Ministre
du
Revenu
national
excipe
par
le
présent
appel
d’une
décision
de
la
Commission
d’appel
de
l’impôt
en
date
du
21
septembre
1960
(25
Tax
A.B.C.
209),
maintenant
l’appel
de
l’intimée
(parfois
ci-après
appelée
le
contribuable)
relativement
à
la
cotisation
pour
l’année
d’imposition
1956
du
contribuable
Eastern
Abattoirs
Ltd.,
de
la
cité
de
Montréal,
province
de
Québec,
par
laquelle
le
Ministre
avait
augmenté
son
revenu
imposable
déclaré
d’un
montant
de
$63,605.15
portant
ainsi
ce
revenu
à
la
somme
de
$302,797.75.
Le
dossier
du
présent
appel,
comme
celui
utilisé
devant
la
Commission
d’appel
de
l’impôt
d’ailleurs
fut
constitué
par
le
moyen
d’une
admission
de
faits
signée
par
les
procureurs
au
dossier
des
deux
parties
en
cause.
Ce
document
révèle
que
toutes
les
actions
ordinaires
de
l’intimée
Eastern
Abattoirs
Ltd.
appartenaient
en
1945
à
Canadian
Pacific
Railway
Company
et
qu’en
cette
même
année,
à
titre
de
subsidiaire,
l’intimée
s’était
prévalue
du
consentement
de
ses
employés
des
avantages
du
fonds
de
pension
de
Canadian
Pacific
Railway
Company,
le
tout
conformément
audit
plan
de
pension
produit
comme
pièce
A-1.
De
1946
à
1955
inclusivement,
le
contribuable
versa
à
ce
fonds
de
pension
un
montant
de
$76,120.47
et
les
employés
de
leur
côté
versèrent
pendant
la
même
période
les
montants
requis
conformément
aux
règlements
du
fonds
de
pension.
Le
19
avril
1955,
le
capital-actions
alors
en
cours
de
l’intimée
fut
vendu
à
un
M.
Maurice
Lemelin,
industriel
de
la
cité
de
Québec,
agissant
tant
pour
lui-même
que
pour
des
tiers
et
par
conséquent
l’intimée
n’était
plus,
à
partir
de
cette
date,
une
subsidiaire
de
Canadian
Pacific
Railway
Company
et
ne
pouvait
par
conséquent
continuer
à
bénéficier
ou
à
se
prévaloir
tant
pour
elle-même
que
pour
ses
employés
dudit
plan
de
pension.
Les
officiers
du
fonds
de
pension
du
Canadian
Pacific
Railway
Company
décidèrent
alors
de
faire
bénéficier
l’intimée
de
la
réserve
alors
en
sa
faveur
au
fonds
de
pension,
soit
un
montant
de
$63,605.15
en
vue
de
la
continuation
d’un
fonds
de
pension
en
dehors
et
différent
de
celui
de
Canadian
Pacific
Railway
Company
et
sans
la
participation
de
cette
dernière
et
de
consulter
les
employés
de
l’intimée
sur
la
question
de
savoir
s’ils
préféraient
la
continuation
d’un
tel
fonds
de
pension
ou
le
remboursement
de
leurs
souscriptions.
A
ces
fins,
M.
Maurice
Lemelin,
au
nom
de
l’intimée,
requit
Canadian
Pacific
Railway
Company
de
transmettre
à
Sun
Life
Insurance
Company
of
Canada
ladite
somme
de
$63,605.15,
ce
qui
s’effectua
le
19
avril
1955
dans
une
lettre
portant
cette
même
date
et
signée
par
M.
B.
Unwin,
vice-
président
de
Canadian
Pacific
Railway
Company.
Le
3
mai
1955,
par
une
lettre
portant
cette
date,
les
officiers
de
Amalgamated
Meat
Cutters
&
Butchers
Workmen
of
North
America,
Local
n°
66,
représentant
les
employés
de
l’intimée
informèrent
cette
dernière
que
ses
employés,
au
cours
d’une
assemblée,
avaient
à
l’unanimité
décidé
de
ne
plus
avoir
de
fonds
de
pension
et
désiraient
recevoir
le
remboursement
de
leurs
souscriptions.
Sun
Life
Insurance
Company
of
Canada
avertie
par
l’intimée
de
la
décision
des
employés
lui
versa
le
6
juin
1955
la
somme
de
$63,605.15.
Ce
montant,
si
on
se
réfère
à
la
lettre
de
M.
B.
Unwin,
vice-
président
du
département
des
finances
de
Canadian
Pacific
Railway
Company
représente:
‘‘The
full
amount
heretofore
contributed
by
Eastern
Abattoirs
Ltd.
to
Canadian
Pacific
Railway
Company
and
representing
a
contingent
provision
for
pensions
based
on
a
percentage
of
its
payroll
for
employees
during
a
portion
of
the
period
and
their
eligibility
under
the
pension
rules
of
Canadian
Pacific
Railway
Company.’’
Le
montant
de
$12,515.82,
soit
la
différence
entre
$76,120.47
et
$63,605.15,
semble
par
conséquent
avoir
été
dépensé
dans
l’intérêt
des
pensionnés
ou
avoir
été
retenu
pour
pourvoir
aux
contingences
dudit
plan
de
pension.
A
tout
événement,
ce
montant
de
$63,605.15,
suivant
l’intimée,
fut
inattendu,
lui
est
parvenu
par
ricochet
en
passant
d’abord
par
la
Sun
Life
Insurance
Company
of
Canada
et
serait,
quant
à
elle,
de
la
manne
tombée
du
ciel.
En
effet,
elle
prétend
qu’elle
n’avait
aucun
droit
à
ce
montant
et
que,
d’autre
part,
ni
le
Canadian
Pacific
Railway
Company
ni
la
Sun
Life
Insurance
n’avaient
l’obligation
de
la
lui
verser.
Elle
soutient,
par
conséquent,
que
ce
montant
ne
peut
être
considéré
comme
un
revenu
taxable
en
vertu
de
la
Loi
de
l’impôt
et
que
partant,
ce
montant
n’est
pas
imposable.
D’autre
part,
selon
l’appelant,
le
montant
serait
imposable
par
le
jeu
de
l’article
3,
et
de
l’article
6(a)
(iv)
combiné
avec
l’article
139(1)
(ar)
de
la
Loi
de
l’impôt
sur
le
revenu,
lesquels
articles
se
lisent
comme
suit
:
“3.
Le
revenu
d’un
contribuable
pour
une
année
d’imposition,
aux
fins
de
la
présente
Partie,
est
son
revenu
pour
l’année
de
toutes
provenances
à
l’intérieur
ou
à
l’extérieur
du
Canada
et,
sans
restreindre
la
généralité
de
ce
qui
précède,
comprend
le
revenu
pour
l’année
provenant
(a)
d’entreprises,
(b)
de
biens,
et
(c)
de
charges
et
d’emplois.
6.
Sans
restreindre
la
généralité
de
l’article
3
doivent
être
inclus
dans
le
calcul
du
revenu
d’un
contribuable
pour
une
année
d’imposition
(a)
les
montants
reçus
dans
l’année
à
titre,
à
compte
ou
au
lieu
de
paiement
ou
en
acquittement
(iv)
de
prestations
de
pension
de
retraite
ou
de
pension,
139.
(1)
,
.
.
(ar)
“prestation
de
pension
de
retraite
ou
de
pension’
comprend
tout
montant
reçu
sur
un
fonds
ou
plan
de
pension
de
retraite
ou
de
pension
ou
en
conformité
d’un
tel
fonds
ou
plan
;
’
’
En
effet,
il
ne
pourrait
être
imposable
par
l’effet
de
l’article
3
seul
car
il
ne
s’agit
pas
d’un
revenu
provenant
de
l’entreprise
de
l’intimée
ou
de
ses
biens
ni
de
charges
et
d’emplois.
Il
ne
s’agit
pas
non
plus
d’un
montant
provenant
des
fruits
de
son
entreprise
ni
d’un
montant
qui
les
remplacerait.
Il
ne
serait
même
pas
imposable
par
le
jeu
combiné
de
l’article
3
et
de
l’article
6(a)
(iv)
puisqu’elle
n’a
pas
reçu
ce
montant
à
titre,
à
compte
ou
au
lieu
de
paiement
ou
en
acquittement
de
prestations
de
pension
de
retraite
ou
de
pension.
En
effet,
si
on
s’en
tient
à
la
signification
des
mots
‘‘
pension
de
retraite
ou
pension”
suivant
le
dictionnaire
l’on
voit
que
les
mots
‘‘pension
de
retraite’’
veulent
dire
des
montants
payés
par
suite
de
la
limite
d’âge
et
“pension”
tous
montants
payés
en
considération
de
services
passés.
Les
mots
anglais
‘‘superannuation
or
pension
benefits”
ont
le
sens
suivant
dans
The
Shorter
Oxford
English
Dictionary:
‘‘to
superannuate;
to
dismiss
or
discharge
from
office
on
account
of
age;
esp.
to
cause
to
retire
from
service
on
a
pension;
to
pension
off;’’
et
“pension”
est
défini
comme
suit:
‘‘an
annuity
or
other
periodical
payment
made
esp.
by
a
government,
a
company
or
an
employer
of
labour
in
consideration
of
past
services
or
of
the
relinquishment
of
rights,
claims
or
emoluments.”’
Quant
au
mot
61
prestation
’
’
pour
en
déterminer
le
sens,
il
faut
se
référer
au
texte
anglais
qui,
comme
nous
l’avons
vu,
emploie
le
mot
‘‘benefit’’
lequel,
d’après
le
dictionnaire,
veut
dire
“avantage
ou
bienfait’’.
L’article
6(a)
(iv)
veut
done
dire
que
doivent
être
inclus
dans
le
calcul
du
revenu
d’un
contribuable
pour
une
année
d’imposition
les
montants
reçus
dans
l’année
à
titre,
à
compte
ou
au
lieu
de
paiement
ou
en
acquittement
de
bienfaits
ou
avantages
par
suite
de
la
mise
à
la
pension
d’un
employé.
Le
montant
recu
par
l’intimée,
qui
d’ailleurs
n’est
pas
un
employé,
ne
tombe
sûrement
pas
dans
cette
catégorie
puisqu’il
se
résume
à
un
simple
transfert
de
fonds
dont
la
seule
relation
avec
le
plan
de
pension
de
ses
employés
est
qu’il
comprend
la
majeure
partie
des
souscriptions
de
l’intimée
à
ce
plan,
souscriptions
d’ailleurs
que
l’intimée
en
vertu
de
la
Loi
fournit
irré-
vocablement
et
qu’elle
a
versées
sans
espoir
de
les
recouvrer
jamais.
Ce
montant
de
$63,605.15
serait-il
imposable
par
le
jeu
de
l’article
139(1)
(ar)
combiné
avec
6(a)
(iv)
et
3
de
la
Loi
de
l’impôt
sur
le
revenu
!
L’appelant
le
soutient
en
soumettant
que
la
Loi
(article
139(1)
(ar)
)
dit
que
tout
montant
reçu
d’un
fonds
de
pension
sans
spécifier
que
cela
soit
par
l’employé
seulement
et
sans
faire
d’exception
pour
l’employeur
doit
être
inclus
dans
le
calcul
du
revenu
d’un
contribuable.
Il
ajoute
que
ceci
est
d’ailleurs
conforme
à
un
principe
fondamental
de
la
Loi
de
l
f
impôt
sur
le
revenu
à
savoir
que
des
dépenses
admises
dans
une
année
donnée
(les
souscriptions
de
la
compagnie
au
plan
de
pension
déduites
comme
dépenses
dans
l’année
où
elles
ont
été
dépensées)
et
récupérées
dans
une
année
subséquente
seraient
imposables
dans
l’année
de
la
récupération.
Il
est
vrai
que
la
Loi
de
l’impôt
sur
le
revenu
prévoit
dans
certains
cas
la
taxation
de
certains
montants
déduits
et
plus
tard
récupérés
mais
seulement
lorsqu’un
texte
de
la
Loi
le
prévoit
clairement.
L’article
6(a)
(iv)
combiné
avec
l’article
139(1)
(ar)
prévoit-
il
la
taxation
de
tout
montant
reçu
et
provenant
d’un
plan
de
pension
ou
ne
prévoit-il
que
les
montants
qui
sont
reçus
par
un
employé
à
l’occasion
de
sa
mise
à
la
retraite
ou
de
la
réception
d’une
pension
?
Il
me
semble
que
donner
aux
articles
6(a)
(iv)
et
139(1)
(ar)
le
sens
que
veut
lui
donner
l’appelant
serait
faire
violence
aux
textes
et
aller
au
delà
de
ce
que
la
législateur
a
décrété.
En
effet,
l’article
139(1)
(ar)
doit
dans
le
présent
cas
être
conditionné
par
l’article
6(a)
(iv)
et
il
ne
peut
s’agir
que
de
montants
recus
par
un
employé
pour
l’avantage
de
qui
seul,
d’ailleurs,
le
plan
de
pension
de
retraite
existe.
Le
sens
du
sous-paragraph
(iv)
de
l’article
6(a)
m’apparaît
encore
davantage
conforme
à
l’interprétation
précitée
si
on
le
lit
avec
les
sous-paragraphes
(v)
et
(vi)
du
même
article
6(a)
qui
se
lisent
comme
suit:
6
‘6.
Sans
restreindre
la
généralité
de
l’article
3,
doivent
être
inclus
dans
le
calcul
du
revenu
d’un
contribuable
pour
une
année
d’imposition
(a)
les
montants
recus
dans
l’année
à
titre,
à
compte
ou
au
lieu
de
paiement
ou
en
acquittement
(iv)
de
prestations
de
pension
de
retraite
ou
de
pension,
(v)
d’allocations
de
retraite,
ou
(vi)
de
prestations
consécutives
au
décès.”
En
effet,
cet
article
6(a)
et
les
trois
sous-paragraphes
déclarent
tout
simplement
que
les
paiements
provenant
d’un
fonds
ou
d’un
plan
de
pension
de
retraite
ou
de
pension
doivent
être
taxés
lorsqu’ils
sont
reçus,
soit
quand
l’employé
est
mis
à
sa
retraite
par
suite
d’une
limite
d’âge
ou
mis
à
sa
pension
tout
simplement
et
c’est
le
cas
prévu
par
(iv)
ci-dessus,
soit
quand
il
résigne
et
c’est
le
cas
prévu
par
(v)
soit
quand
il
meurt
et
c’est
le
cas
prévu
par
(vi).
Ceci
établit
done
clairement
qu’il
ne
peut
s’agir
que
d’un
montant
reçu
d’un
fonds
ou
d’un
plan
de
pension
par
un
employé.
Il
est
fondamental
qu’un
impôt
ne
peut
être
imposé
que
par
un
texte
clair.
Or
il
m’est
impossible
de
conclure
que
l’article
139(1)
(ar)
permettrait
à
l’article
6(a)
(iv)
de
la
Loi
de
l’impôt
sur
le
revenu
d’englober
comme
revenu
imposable
un
montant
reçu
par
un
employeur
dans
les
circonstances
ci-haut
mentionnées
lorsque
cet
article
6(a)
(iv)
ne
prévoit
que
les
montants
recus
par
un
employé
et
comme
rien
d’autre
dans
ladite
Loi
ne
permet
de
considérer
ce
montant
de
$63,605.15
comme
un
revenu,
il
n’est
pas
imposable.
Pour
tous
ces
motifs,
il
y
a
lieu
de
renvoyer
le
présent
appel,
l’intimé
ayant
droit
à
tous
ses
honoraires
taxables,
et
de
déférer
le
tout
au
Ministre
pour
qu’il
émette
une
nouvelle
cotisation
déduisant
du
revenu
de
l’intimée
pour
l’année
1956
ladite
somme
de
$63,605.15.
Jugement
en
conséquence.