Le
Juge
Décary:—Dans
cette
affaire
il
s’agit
de
déterminer
si
le
Ministre
avait
le
droit
d’imposer
comme
revenu
un
bénéfice
réalisé
par
le
demandeur
parce
qu’il
aurait
exercé
une
entreprise
ou
une
affaire
selon
les
dispositions
de
l’article
248(1)
de
la
Loi.
Les
mots
«entreprise
ou
affaire»
sont
définis
au
dit
article
comme
suit:
«entreprise
ou
affaire»
comprend
une
profession,
un
métier,
un
commerce,
une
manufacture
ou
une
activité
de
quelque
genre
que
ce
soit
et,
sauf
aux
fins
de
l’alinea
18(2)(c),
comprend
un
projet
comportant
un
risque
ou
une
affaire
de
caractère
commercial
mais
ne
comprend
pas
une
charge
ni
un
emploi;
A
mon
avis,
cette
affaire
ne
peut
être
décidée
qu’en
jaugeant
l'intention
et
les
actes
du
demandeur.
Avant
de
jauger
l’intention
et
les
faits
qui
la
corroborent
ou
la
contredisent,
je
crois
nécessaire
d’établir
les
faits
indéniables
de
la
cause:
le
21
août
1971,
le
demandeur
acheta
un
terrain
de
96
acres
au
coût
de
$142,000.
Le
2
avril
1974
le
demandeur
revendit
le
même
terrain,
moins
1
acre,
au
prix
de
$1,282,608.
Le
prix
était
fixé
à
$13,500
l’acre
pour
une
superficie
de
95.008
acres.
ll
est
propice,
je
crois,
de
citer
le
paragraphe
7
de
la
défense:
«Le
Sous-procureur
général
du
Canada
déclare
que
le
Ministre
du
revenu
national
en
cotisant
le
demandeur
comme
il
l’a
fait
pour
les
années
d’imposition
1974
et
1975
s’est
basé,
entre
autres
choses,
sur
les
faits
suivants:
a)
le
demandeur
est
un
homme
d’affaires
averti
qui
était
impliqué
dans
de
nombreuses
transactions
immobilières
depuis
de
nombreuses
années,
soit
directement
soit
par
l'intermédiaire
de
compagnies
dont
il
faisait
partie
ou
qu'il
contrôlait,
ou
en
société
ou
de
concert
avec
d’autres;
b)
lors
de
l’acquisition
du
terrain
en
question,
par
contrat
écrit,
il
fut
prévu
que
l’acquéreur
pouvait
payer
par
anticipation
la
balance
du
prix
de
vente
sans
pénalité
ni
avis;
c)
il
fut
également
prévu
dans
le
contrat
d’acquisition
que
l’acquéreur
pouvait
obtenir
mainlevée
partielle
des
hypothèques
et
privilèges
du
vendeur
qui
pouvaient
affecter
la
propriété
à
certaines
conditions
y
spécifiées;
d)
le
prix
payé
à
l’acre
pour
le
terrain
en
question
était
très
favorable
compte
tenu
des
transactions
immobilières
dans
la
région
pour
la
période
concernée;
e)
le
terrain
concerné
est
contigu
à
la
propriété
du
demandeur
qui
à
peine
neuf
mois
auparavant
venait
de
vendre
un
autre
terrain
voisin
de
sa
propriété;
f)
de
nombreuses
compagnies
immobilières
telles
que
Campeau
Construction,
Costain
Limited
et
autres
transigeaient
dans
les
environs;
g)
plusieurs
projets
domiciliaires
étaient
projetés
ou
en
voie
de
développement
dans
les
environs;
h)
dans
la
période
s’étendant
entre
les
années
1969
a
1972,
le
demandeur
a
participé
à
la
creation,
comme
actionnaire
important,
d’au
moins
cinq
compagnies
dont
les
activités
se
rapportaient
de
quelque
façon
au
commerce
immobilier
ou
a
la
construction;
i)
en
1971,
le
terrain
en
question
n'avait
pas
été
mis
en
vente
par
agent
d’immeuble
et
c’est
le
demandeur
lui-même
qui
a
entrepris
des
démarches
afin
d’acheter
le
terrain;
j)
le
demandeur
n’a
pas
entrepris
de
travaux
ni
rien
fait
pour
tirer
un
revenu
de
la
propriété
en
question
pendant
le
temps
qu’elle
fut
en
sa
possession.»
C’est
mon
opinion
bien
arrêtée
que
le
Ministre
c’est
basé
sur
des
faits
que
la
preuve
a
révélés
vrais
pour
la
majorité
des
faits
pertinents.
Quant
au
paragraphe
a)
la
preuve
a
clairement
révélé
que
le
demandeur,
à
part
son
commerce
d’entrepreneur
électricien
qu'il
exerce
sous
forme
de
compagnie,
a
participé
soit
seul
soit
avec
des
associés
à
plusieurs
transactions
immobilières.
Ces
transactions
avaient
presque
toujours,
à
deux
exceptions
près,
comme
objet
des
terrains
vacants.
En
d’autres
mots,
il
ne
s’agissait
pas
de
placements
qui
étaient
des
sources
de
revenu
actuel
ou
potentiel,
mais
de
biens
qui
étaient
de
l'inventaire.
Le
paragraphe
b)
à
mon
avis
n’a
pas
de
pertinence
suffisamment
importante
pour
être
retenu.
La
question
de
mainlevée
au
paragraphe
c)
revêt,
au
contraire,
une
certaine
importance.
En
effet,
une
telle
clause
permettait
le
morcellement
du
terrain
à
la
capacité
financière
du
développeur.
Une
telle
clause
rend
un
terrain
beaucoup
plus
attrayant
et
d’usage
beaucoup
plus
commode
pour
un
développeur.
Cette
clause
existe
dans
le
contrat
d’acquisition.
Quant
à
savoir
si
le
prix
payé
à
l’acre
fut
très
favorable
comparativement
aux
transactions
immobilières
dans
la
région,
je
suis
d’opinion
que
ce
paragraphe
d)
n’est
pas
pertinent
parce
que,
pour
que
des
prix
soient
comparables,
il
faut
que
les
objets
soient
identiques.
Ce
n’est
pas
le
cas
pour
les
transactions
immobilières
auxquelles
on
a
référé
la
Cour.
Au
paragraphe
e)
l’on
réfère
a
la
contiguïté
du
terrain
de
96
acres
acquis
et
la
vente
neuf
mois
auparavant
d’un
terrain
voisin
de
1
acre.
A
mon
avis,
l’on
ne
peut
pas
comparer
un
terrain
de
1
acre
et
un
de
96
acres.
L’ordre
de
grandeur
change
le
caractère
de
l’objet.
Ce
n’est
pas
la
même
personne,
normalement,
qui
achète
1
acre
que
celle
qui
achète
100
acres.
Quant
au
paragraphe
f)
la
preuve
ne
m’a
pas
convaincu
que
de
telles
transactions
pouvaient
être
pertinentes
à
la
cause.
Le
paragraphe
g)
contient,
à
mon
avis,
une
affirmation
trop
générale
pour
qu'il
me
soit
possible
de
dire
qu’il
y
a
preuve
à
ce
sujet
en
1971.
Quant
au
paragraphe
h)
je
suis
satisfait
qu'il
y
a
preuve
à
l’effet
que
le
demandeur
a
participé
à
l’opération
de
compagnies
immobilières
ou
de
construction.
Le
fait
qu'il
s’agisse
de
compagnies
et
que
le
demandeur
ait
agi
comme
actionnaire,
n’a
aucune
pertinence
dans
l’affaire
présente
à
cause
du
nombre
de
participations.
De
plus,
il
ne
s’agit
pas
de
compagnies
publiques
dont
les
actions
sont
transigées
sur
le
marché.
S'il
en
était
ainsi,
je
suis
convaincu
qu'il
faudrait
envisager
cette
participation
d’une
façon
différente.
Je
ne
vois
pas
la
pertinence
du
paragraphe
I)
pour
influencer
le
caractère
de
la
transaction.
Quant
au
paragraphe
j)
la
preuve
a
révélé
que
tel
était
le
cas
et
que
l’on
devait
déduire
de
cette
façon
d’agir
qu’un
spéculateur
aurait
agi
de
la
même
façon
et
qu'il
s’agissait
pour
le
demandeur
d’un
item
d'inventaire.
Vu
que
transiger
dans
l’immeuble
a
fait
partie
du
mode
de
vie
du
demandeur,
à
un
degré
moindre
que
sa
profession
d’électricien,
néanmoins,
que
l’achat
du
terrain
ait
été
décidé
sous
l'impulsion
du
moment
ou
après
une
longue
réflexion
est
un
fait
non
pertinent
pour
decider
de
l’affaire.
Il
m’est
impossible
d’accepter
comme
fait
que
le
demandeur
n'avait
pas
d’autre
intention
que
de
détenir
le
terrain.
Il
n'était
certes
pas
nécessaire
d’acheter
le
terrain
pour
permettre
qu’un
membre
de
la
famille
pratique
de
l'équitation
puisque
cette
pratique
se
faisait
sur
ce
même
terrain
depuis
plusieurs
années.
A
mon
avis,
la
conduite
du
demandeur,
qui
doit
être
prise
en
considération
pour
décider
de
l’affaire
présente,
dénote
un
mode
d’agir
qui
tient
de
la
spéculation
et
non
du
placement.
Ces
remarques
couvrent
la
période
à
partir
de
l’acquisition
jusqu’à
celle
où
il
fut
approché
pour
vendre
cette
terre.
Les
circonstances
qui
ont
entouré
la
vente
furent
décrites
par
l’avocat
du
demandeur
comme
indiquant
qu'il
s’agissait
de
l’aliénation
d’un
bien
de
capital.
Le
futur
acheteur
a
agi
par
le
truchement
d’un
agent
immobilier.
Cet
agent
approcha
le
demandeur
mais
ce
dernier
l’éconduit
en
lui
disant
qu'il
n’était
pas
intéressé
à
vendre.
A
la
deuxième
rencontre,
qui
n’était
pas
entendue,
l’agent
apporta
une
offre
d’achat
de
$10,000
l’acre.
Le
demandeur
ratura
ce
montant
pour
qu'il
se
lise
$13,500
et
le
comptant
de
$350,000
pour
qu’il
se
lise
$475,000.
Le
montant
total
était
de
$1,282,608.
Entre
la
premiere
et
la
seconde
rencontre,
le
demandeur
envoya
son
bras
droit
à
Toronto
pour
vérifier
si
il
y
avait
un
dépôt
de
$25,000
entre
les
mains
de
l’avocat
du
futur
acheteur.
Pour
une
personne
qui
se
disait
non
intéressée
à
vendre,
ce
geste
semble
plutôt
étrange.
Une
personne
intéressée
à
vendre
n’aurait
pas
agi
autrement.
Quant
au
grand
état
que
l’on
a
fait
en
preuve
que
le
demandeur
avait
mentionné
qu'il
ne
voulait
pas
vendre
et
qu'il
avait
demandé
un
prix
ridicule
de
$15,000
l’acre,
je
ne
crois
pas
que
l’on
puisse
considérer
cela
comme
un
fait
attestant
qu’il
ne
voulait
pas
vendre,
mais
plutôt
comme
le
fait
que
le
demandeur
a
agi
comme
quelqu’un
qui
voulait
obtenir
le
meilleur
prix
possible.
Je
conclus
donc
que
cette
manière
d’agir
est
un
fait
démontrant
que
le
demandeur
voulait
se
défaire
de
la
propriété
à
condition
d’obtenir
le
meilleur
prix
possible.
A
mon
avis,
il
n’est
pas
nécessaire
de
considérer
chaque
critère
établi
par
la
jurisprudence
car
je
conclus
que
l’objet
de
la
transaction,
considérant
le
mode
de
vie
du
demandeur
et
considérant
les
faits
en
preuve,
a
toujours
été
un
inventaire
entre
ses
mains.
Il
est
evident
que
dans
cette
affair
le
demandeur
n’a
pas
agi
comme
il
l’avait
fait
dans
les
autres
transactions,
mais
cette
façon
d’agir
n’est
pas
telle
qu’elle
empêche
l’objet
de
la
transaction
d’être
un
inventaire
entre
ses
mains.
L’appel
est
rejeté
avec
dépens.